Une association déterminée à sortir les talibés de la rue
Introduction
La mendicité des talibés, ces enfants confiés par leurs
parents à des maîtres coraniques mais qui sont forcés à mendier pour survivre,
est un phénomène malheureusement très répandu au Sénégal. Ces enfants, âgés
parfois de seulement 4 ou 5 ans, sont envoyés dans les rues pour récolter de
l'argent et du riz qu'ils doivent ensuite remettre à leur maître coranique.
Cette pratique, ancrée depuis des siècles dans la tradition sénégalaise, prive
ces enfants de leur enfance et les empêche de recevoir une éducation digne de
ce nom.
Face à ce triste constat, des voix s'élèvent pour dénoncer cette exploitation des talibés et tenter de leur venir en aide. C'est le cas de l'association PMGC, créée en 2019 à Dakar par un groupe de citoyens engagés et déterminés à sortir les talibés de la rue. Portrait d'une association mobilisée pour offrir un avenir meilleur à ces enfants vulnérables.
Les objectifs principaux de l'association sont les suivants
:
- Sortir les talibés des rues en les hébergeant dans des
daaras de transition, des structures d'accueil temporaires qui leur offrent le
gîte et le couvert.
- Scolariser les talibés et leur offrir une éducation de
qualité pendant leur séjour dans les daaras de transition.
- Sensibiliser les populations sur les droits de l'enfant et
la nécessité de protéger les talibés contre toutes formes d'exploitation.
- Nouer le dialogue avec les maîtres coraniques pour les convaincre d'arrêter de forcer les talibés à mendier.
Les actions concrètes
menées sur le terrain
Concrètement, quelles sont les actions menées par les membres de l'association PMGC pour venir en aide aux talibés ? Tour d'horizon des initiatives lancées ces dernières années.
L'accueil dans les
daaras de transition
L'association gère actuellement plusieurs daaras de transition à
Dakar et dans d'autres villes du Sénégal. Le principe : proposer aux talibés un
hébergement temporaire dans un environnement sain, où ils sont nourris, blanchis
et soignés. L'objectif est de les sortir de la rue le temps de les rescolariser
et de leur redonner le goût d'apprendre, avant de les réinsérer dans leur
famille.
Dans les daaras de l'association, pas de maître coranique ni
d'obligation de mendier. Les talibés sont encadrés par des éducateurs
bienveillants qui veillent à leur bon développement. Ils reçoivent des cours
d'alphabétisation et de calcul, apprennent des notions d'hygiène et participent
à des activités récréatives.
Le séjour dans ces structures leur permet de se reposer, de
reprendre des forces, mais aussi de réapprendre à être des enfants. Sortis de
la survie quotidienne dans les rues, ils retrouvent leur dignité.
La sensibilisation du
grand public
L'association mène également des actions de sensibilisation
pour changer le regard de la société sur les talibés. Objectif : faire
comprendre que ces enfants sont avant tout des victimes qu'il faut protéger.
Elle organise ainsi des campagnes de communication dans les
médias, des interventions dans les écoles et lycées et des actions de rue pour
informer le grand public sur la réalité de la vie des talibés. Des spots radio
et télé sont diffusés pour faire évoluer les mentalités.
Des leaders d'opinion et des célébrités sont également sollicités pour relayer ces messages et toucher un public toujours plus large.
Le plaidoyer auprès des autorités
Parallèlement, l'association mène un travail de plaidoyer
auprès des pouvoirs publics pour faire évoluer le cadre légal autour des
talibés. Elle milite notamment pour l'application stricte de la loi sur la
mendicité des talibés votée en 2010, mais très peu appliquée sur le terrain.
Des rencontres sont régulièrement organisées avec les
autorités administratives pour les convaincre de prendre leurs responsabilités
et de renforcer la protection de ces enfants vulnérables.
L'association monte également des projets pilotes innovants, comme l'ouverture des daaras de transition, pour démontrer aux autorités que des solutions concrètes existent pour sortir les talibés de la rue.
La médiation avec les maîtres coraniques
Sachant que la clé du changement réside aussi du côté des
maîtres coraniques eux-mêmes, l'association initie avec eux un dialogue
constructif.
Elle les sensibilise sur les textes de loi en vigueur et sur
les conséquences néfastes de la mendicité sur le développement des talibés. Des
formations sont même proposées pour les convaincre d'adopter de nouvelles
pratiques éducatives, dans l'intérêt supérieur de l'enfant.
Certains maîtres coraniques partenaires autorisent désormais leurs talibés à fréquenter les daaras de transition de l'association pendant une période de remise à niveau. Un grand pas vers le changement des mentalités.
La réinsertion familiale et sociale
Enfin, l'association travaille à la réinsertion durable des
talibés une fois leur passage en daara de transition terminé. Un travail de
médiation est fait avec les familles pour favoriser la réintégration de
l'enfant dans son milieu d'origine.
Des formations professionnelles sont également proposées aux
talibés les plus âgés pour leur donner une qualification et augmenter leurs
chances de trouver un emploi décent. Coiffure, menuiserie, couture. les
filières sont adaptées à la demande du marché du travail.
Cette réinsertion socio-professionnelle vise à ce que les talibés, une fois adultes, ne se retrouvent pas à leur tour dans l'obligation de mendier ou de faire mendier leurs propres enfants. Le cercle vicieux de la pauvreté est ainsi rompu sur le long terme.
Des défis multiples pour poursuivre la lutte
Malgré ces actions remarquables, l'association PMCG fait face à
de nombreux défis pour parvenir à sortir durablement les talibés de la rue
Le principal défi reste le manque de moyens financiers.
Malgré les dons et subventions, les besoins sur le terrain sont colossaux face
à l'ampleur du phénomène (des dizaines de milliers d'enfants concernés). Il
faut trouver plus de fonds pour ouvrir de nouveaux daaras d'accueil et
embaucher du personnel qualifié.
L'association se heurte également à certaines résistances
culturelles et au poids des traditions. La mendicité fait partie intégrante de
l'enseignement coranique au Sénégal depuis des siècles, il n'est pas aisé de
faire évoluer les mentalités. Beaucoup restent attachés à l'ancien système et
rejettent toute ingérence extérieure.
Le dialogue est donc essentiel, mais il requiert beaucoup de
patience et de pédagogie. L'association doit redoubler d'efforts pour
convaincre toutes les parties prenantes, à commencer par les maîtres coraniques
et les parents des talibés. Sans leur adhésion, aucun changement pérenne ne
sera possible.
Enfin, malgré les lois existantes, l'application des textes
reste insuffisante sur le terrain, notamment en raison de la complicité de
certaines autorités locales avec les maîtres coraniques. Une meilleure
coordination des services de l’État est indispensable pour une politique
efficace de protection de l'enfance.
Conclusion
Grâce à son engagement et à ses actions concrètes pour
sortir les talibés de la rue, l'association PMGC donne l'exemple. Elle démontre
qu'il est possible de changer les choses et d'offrir un avenir meilleur à ces milliers
d'enfants au Sénégal.
Mais le combat est encore long pour abolir définitivement
cette pratique néfaste qu'est la mendicité des talibés. La mobilisation de tous
- associations, citoyens, pouvoirs publics - est plus que jamais nécessaire
pour faire enfin respecter les droits fondamentaux de ces enfants.
L'association PMGC ne baisse pas les bras et continuera
inlassablement ses actions sur le terrain. Elle compte sur le soutien du plus
grand nombre pour l'aider à atteindre cet objectif qui lui tient tant à cœur :
offrir aux talibés une enfance digne et épanouie.
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